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1882

Orientalisme, science et controverse : Abraham Ecchellensis (1605-1664)

Abstract

Abraham Ecchellensis (Ibrahîm Al-Hâqilânî) est sans doute le plus représentatif des chrétiens orientaux qui contribuèrent à la formation de l’orientalisme européen au siècle. Après une première éducation dans un couvent libanais, il arriva au collège maronite de Rome en 1620, où il fut très jeune reconnu pour ses talents dans l’enseignement de l’arabe et du syriaque, et dans l’expertise des questions orientales. Ses études achevées, il mena quelques aventures militaires et commerciales au service de l’emir libanais Fakhraddîn et de la croisade, en se plongeant brièvement dans les trafics méditerranéens liés à la course et au rachat des captifs. Il tenta aussi d’ouvrir un collège au Liban.

Mais c’est surtout par une carrière d’érudit qu’il se fit connaître. Ce volume s’attache moins à la biographie d’Abraham; Ecchellensis qu’à la place qu’il occupa dans la République des Lettres du siècle, entre Pise, Rome et Paris (où il enseigna au Collège Royal). Il sut bénéficier d’un réseau de protecteurs, qui estimaient sa capacité à cataloguer et publier des manuscrits, enseigner les langues, ou servir d’expert et d’interprète : Les Médicis, les Barberini, Richelieu, Mazarin et le chancelier Séguier veillèrent successivement sur sa carrière. Il fut l’ami et le collaborateur de savants de son temps, comme Jean Morin, Marin Mersenne, Lucas Holsten ou Athanase Kircher.

Il contribua aux grands chantiers intellectuels du siècle, comme la bible polyglotte de Paris et la bible arabe de Rome. Il composa des outils pour l’apprentissage de l’arabe et du syriaque. Mais il fut surtout un traducteur d’ouvrages en langues orientales. Chez lui, la controverse et l’apologétique ne se distinguaient guère de l’érudition, et il entendait mettre sa science au service de la foi catholique, contre les protestants. Mais ses origines orientales et arabophones l’amenèrent aussi à défendre la dignité des Orientaux et à valoriser leur culture face aux milieux savants européens. Il contribua à l’élaboration du « récit national » maronite et libanais. Il voulut faire connaître la « sagesse arabe » et l’intégrer dans la science européenne, en la distinguant de l’islam, qu’il ne pouvait accepter. Il collabora avec le professeur «galiléen» de Pise Giovanni Alfonso Borelli, pour traduire à partir de manuscrits arabes le traité d’Apollonius de Perga sur le .

Ses travaux érudits furent utilisés dans les controverses théologiques du second siècle. Mais, au début du siècle, la connaissance des langues orientales était suffisamment avancée en Europe pour qu’on pût se passer des « médiateurs » issus du Collège de Rome.

Bernard Heyberger, directeur d’études à l’École Pratique des Hautes Études, est professeur à l’université François-Rabelais de Tours et membre de l’Institut Universitaire de France. Ses travaux portent sur le christianisme de langue arabe et sur les relations entre le christianisme et l’islam. Il a notamment publié (1994) et (2001).

References

/content/books/10.1484/M.BEHE-EB.5.106538
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