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Il n’est pas de meilleure figuration de la jonction qui s’établit entre Borges et les littératures européennes que sa bibliothèque personnelle. Celle-ci donne en effet à voir non seulement les auteurs, les textes et les langues du continent les plus chers à Borges, mais aussi le tête-à-tête qui, à travers les marginalia et les nombreuses marques de lecture, s’instaure entre l’écrivain et chaque livre, puis entre les différents livres qu’il acquiert, possède et conserve en ce lieu de lecture et de genèse de l’écriture. L’appréhension de cette bibliothèque d’auteur s’inscrit dans un domaine d’étude particulier, celui des bibliothèques d’écrivains, situé à la croisée de la philologie moderne, de la critique génétique, de la création littéraire, des études de réception et d’histoire de la lecture. Au-delà d’une des- cription de faits de lecture précis, cet article montre comment la bibliothèque personnelle de Borges, par sa paradigmaticité, interroge et modifie le protocole d’analyse, la méthodologie critique et le cadre théorique qui traditionnellement définissent l’étude des bibliothèques d’écrivains.
AbstractThere is no better representation of the ties developed between Borges and European literature than his personal library. The latter in fact allows us to view not only the authors, texts, and languages of the continent dearest to Borges, but also the tête-à-tête which, through the marginalia and numerous reading marks, was established between the writer and each book, as well as among the various books he acquired, owned and preserved in this place of reading and literary creation. Apprehension of this library forms part of a particular field of study, or that of writers’ libraries, situated at the intersects of modern philolog y, genetic criticism, literary creation, and studies of reading reception and history. Beyond a description of reading facts, this article demonstrates how Borges’s personal library - by means of its exemplarity - questions and modifies analysis protocol, critical methodology, and the theoretical framework that traditionally defines the study of writers’ libraries.