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Chez François Emmanuel, l’oblitération du patronyme ne procède pas d’une logique de singularisation. Au contraire, le geste d’élever un second prénom relativement banal au rang de patronyme, à une époque de médiatisation extrême du personnage de l’écrivain, relèverait plutôt d’une tension vers un relatif anonymat. Il serait cependant trop simple de confiner la suppression patronymique à un règlement de comptes familial ; Emmanuel lui-même souligne bien que c’est d’une certaine manière vers sa famille qu’il revient dans son activité de romancier. Au départ d’une analyse des relations familiales et nominales telles qu’elles sont entretenues dans l’œuvre (principalement dans Le sentiment du fleuve), il devient possible d’éclairer le nom de plume en tant que vecteur privilégié de ce que l’écrivain appelle « la disponibilité du romancier », c’est-à-dire la mise à l’écart de soi nécessaire à l’émergence de la fiction. En ce sens, le pseudonyme se donne à lire comme une matrice symbolique de l’œuvre.
AbstractIn the case of François Emmanuel, the obliteration of his patronym does not stem from a desire to be unique. On the contrary, his gesture – transforming his relatively banal second first name into a patronym, and this during a period of extreme mediatization of authorial figures – belongs more to a tendency toward relative anonymity. It would, however, be reductive to attribute the suppression of his patronym to a simple settling of family scores. Emmanuel himself underscores the notion that his novelistic writing, in a certain sense, does in fact bring him back toward his family. Beginning with an analysis of the nominal and familial relations at work in his body of work (but principally Le sentiment du fleuve), it becomes possible to shed light on the pen name as a privileged vector of what the writer calls « the novelist’s availability », that is, the putting-aside of oneself necessary for the fiction to emerge. In this sense, the pseudonym stands as symbolic matrix for the overall work.